Quel était l’objectif de la revue ?
Notre objectif était de déterminer si le tacrolimus est un traitement efficace et sûr pour les personnes atteintes de rectocolite hémorragique difficile à traiter.
Contexte
La rectocolite hémorragique est une maladie inflammatoire ulcéreuse chronique de l'intestin caractérisée par des poussées récurrentes de la maladie qui touchent généralement le rectum, le côlon ou les deux. Les personnes atteintes de la maladie active pourraient ressentir des crampes abdominales, une envie pressante d'aller à la selle et une diarrhée sanglante. Les personnes atteintes de rectocolite hémorragique peuvent constater que les traitements standard de la maladie active ne sont pas efficaces. Le tacrolimus est un médicament qui diminue l'activité du système immunitaire. Nous voulions savoir si le tacrolimus est efficace dans la rectocolite hémorragique résistante aux autres traitements.
Plusieurs types de thérapies ont été utilisés pour tenter de gérer les cas difficiles de rectocolite hémorragique et il n'y a actuellement aucun consensus parmi les cliniciens sur la stratégie thérapeutique la plus efficace.
Qu'étudie cette revue ?
Dans cette revue, nous avons examiné les données issues de cinq études comparant le tacrolimus à un placebo (traitement factice) et à deux autres médicaments appelés la béclométasone et la ciclosporine.
Nous voulions savoir si le tacrolimus est plus efficace pour faire disparaître les symptômes de la rectocolite hémorragique (rémission) ou pour les améliorer, ainsi que savoir si son utilisation est sûre.
Principaux messages
Le tacrolimus pourrait être meilleur que le placebo pour arrêter les symptômes ou les améliorer.
Le tacrolimus pourrait ne pas être pas différent de la béclométasone concernant l'arrêt des symptômes ou leur amélioration.
Peu de données sur la comparaison entre le tacrolimus et la ciclosporine sont disponibles.
Il est difficile de dire si le tacrolimus provoque plus ou moins d'effets secondaires par rapport au placebo ou aux deux autres médicaments, en raison des données très limitées.
Quels ont été les principaux résultats de la revue ?
Nous avons recherché des essais contrôlés randomisés (études cliniques dans lesquelles les participants sont assignés à l'un des deux groupes de traitement ou plus à l'aide d'une méthode aléatoire) comparant le tacrolimus à tout autre traitement (comme les traitements par placebo) chez les personnes présentant des cas difficiles de rectocolite hémorragique. Nous avons trouvé cinq essais avec 344 participants dont nous avons tiré les conclusions suivantes.
Il existe des données probantes de faible qualité suggérant que le tacrolimus pourrait être plus efficace que le placebo pour arrêter ou améliorer les symptômes de la rectocolite hémorragique.
Il existe des données probantes de faible qualité suggérant que le tacrolimus n'est pas différent de la béclométasone pour arrêter ou améliorer les symptômes de la rectocolite hémorragique.
Les données probantes étaient de très faible qualité concernant l’efficacité du tacrolimus pour arrêter ou améliorer les symptômes de la rectocolite hémorragique, par rapport à la ciclosporine.
il y avait des données probantes de très faible qualité suggérant que le tacrolimus provoque plus ou moins d'effets secondaires par rapport au placebo ou aux deux autres médicaments, en raison des données très limitées.
Cette revue est-elle à jour ?
Cette revue est à jour jusqu’en octobre 2021.
Il existe des données probantes d’un niveau de confiance faible concernant l’efficacité potentiellement supérieure du tacrolimus par rapport au placebo dans la rémission et l’amélioration clinique de la rectocolite hémorragique ou la proctite ulcéreuse résistante aux corticostéroïdes. Les données probantes sont très incertaines quant à l'effet du tacrolimus pour l'obtention d'une rémission ou d'une amélioration clinique par rapport à la ciclosporine. Il pourrait ne pas y avoir de différence entre le tacrolimus et la béclométasone dans l’induction d’une rémission ou d’une amélioration clinique.
Les cohortes étudiées à ce jour étaient petites avec des ensembles de données manquantes, un suivi court et les critères cliniques utilisés n'étaient pas conformes à ceux suggérés par les organismes de réglementation. Par conséquent, aucune conclusion ne peut être tirée en matière de pratique clinique.
Cette revue met en évidence la nécessité de poursuivre les recherches en ciblant les questions cliniques pertinentes, en utilisant une méthodologie d'essai appropriée et en rapportant les principaux résultats d'une manière systématique pour faciliter leur intégration avec les données probantes actuelles afin de mieux informer les cliniciens et les patients. Les études dans le futur devront être suffisamment puissantes et d'une durée adaptée pour déterminer l’efficacité théorique et pratique du tacrolimus à moyen et long terme. Des études d'efficacité bien structurées devront faire l’objet d’un suivi à long terme de phase 4 afin de fournir des résultats clés et pertinents dans un contexte réel.
Les alternatives thérapeutiques sont limitées pour les personnes atteintes de rectocolite hémorragique résistante aux corticostéroïdes. Des modèles animaux de maladies inflammatoires de l'intestin et des études non contrôlées chez l'homme suggèrent que le tacrolimus pourrait être un traitement efficace de la rectocolite hémorragique.
Évaluer l'efficacité et la tolérance du tacrolimus pour l’induction de la rémission chez les personnes atteintes de rectocolite hémorragique résistante aux corticostéroïdes.
Nous avons effectué des recherches dans le registre spécialisé du groupe Cochrane sur l'hépato-gastro-entérologie, CENTRAL, Medline (PubMed), Embase, Clinicaltrials.gov et dans le Système d'enregistrement international des essais cliniques de l'OMS (ICTRP) de l'OMS, depuis leur création jusqu’à octobre 2021, afin d'identifier les essais contrôlés randomisés (ECR) pertinents.
Deux auteurs de la revue ont indépendamment sélectionné les études potentiellement pertinentes afin de déterminer leur éligibilité en fonction de critères prédéterminés.
Deux auteurs de la revue ont indépendamment extrait les données et les ont analysées à l'aide de Review Manager Web. Les critères de jugement principaux étaient l'induction d'une rémission et l'amélioration clinique, telles que définies par les études et exprimées en pourcentage des participants randomisés (analyse en intention de traiter).
Cette revue a inclus cinq ECR avec 347 participants atteints de rectocolite hémorragique ou de proctite ulcéreuse actives. La durée de l'intervention variait entre deux et huit semaines.
Le tacrolimus par rapport au placebo
Le tacrolimus (oral et rectal) serait plus efficace pour engendrer une rémission clinique par rapport au placebo (oral et rectal) (14/87 participants avec le tacrolimus contre 1/61 participants avec le placebo ; risque relatif (RR) 3,76, intervalle de confiance (IC) à 95 % entre 1,03 et 13,73 ; 3 études). Ces résultats sont d'un niveau de confiance faible en raison d’une imprécision et du risque de biais.
Le tacrolimus (oral et rectal) serait plus efficace pour l'amélioration clinique, par rapport au placebo (oral et rectal) (45/87 participants avec le tacrolimus contre 7/61 participants avec le placebo ; RR 4,47, IC à 95 % entre 2,15 et 9,29 ; 3 études). Ces résultats sont d'un niveau de confiance faible en raison d’une imprécision et du risque de biais.
Les données probantes sont très incertaines quant aux effets du tacrolimus (oral et rectal) sur les effets indésirables graves par rapport au placebo (oral et rectal) (2/87 participants avec le tacrolimus contre 0/61 participants avec le placebo ; RR 2,44, IC à 95 % entre 0,12 et 48,77 ; 3 études). Ces résultats sont d'un niveau de confiance très faible en raison d'une imprécision et d’un risque de biais élevés.
Le tacrolimus par rapport à la ciclosporine
Une étude a comparé le tacrolimus oral à la ciclosporine intraveineuse avec une intervention de deux semaines et 113 participants randomisés. Les données probantes sont très incertaines quant à l'effet du tacrolimus sur l'obtention d'une rémission clinique par rapport à la ciclosporine (15/33 participants avec le tacrolimus contre 24/80 participants avec la ciclosporine ; RR 1,52, IC à 95 % entre 0,92 et 2,50). Les données probantes sont d'un niveau de confiance très faible en raison d’un risque de biais et d'une grande imprécision.
Les données probantes sont très incertaines concernant l'effet du tacrolimus sur l'amélioration clinique par rapport à la ciclosporine intraveineuse (23/33 participants avec le tacrolimus contre 62/80 participants avec la ciclosporine ; RR 0,90, IC à 95 % entre 0,70 à 1,16). Les données probantes sont d'un niveau de confiance très faible en raison d’un risque de biais et d'une imprécision.
Le tacrolimus par rapport à la béclométasone
Une étude a comparé les suppositoires au tacrolimus aux suppositoires à la béclométasone dans une intervention de quatre semaines avec 88 participants randomisés. Il pourrait y avoir peu ou pas de différence dans l'obtention d'une rémission clinique (16/44 participants avec le tacrolimus contre 15/44 participants avec la béclométasone ; RR 1,07, IC à 95 % entre 0,60 à 1,88). Les résultats sont d’un niveau de confiance faible en raison d'une grande imprécision.
Il y aurait peu ou pas de différence dans l'amélioration clinique entre les suppositoires au tacrolimus et les suppositoires à la béclométasone (22/44 participants avec tacrolimus contre 22/44 avec béclométasone ; RR 1,00, IC à 95 % entre 0,66 et 1,52). Les résultats sont d’un niveau de confiance faible en raison d'une grande imprécision.
Il pourrait y avoir peu ou pas de différence entre les suppositoires au tacrolimus et les suppositoires à la béclométasone concernant les effets indésirables graves (1/44 participants avec le tacrolimus contre 0/44 avec la béclométasone ; RR 3,00, IC à 95 % entre 0,13 et 71,70). Ces résultats sont d'un niveau de confiance faible en raison d'une grande imprécision.
Il pourrait y avoir peu ou pas de différence dans le nombre total d'effets indésirables entre les suppositoires au tacrolimus et les suppositoires à la béclométasone (21/44 participants avec tacrolimus contre 14/44 participants avec béclométasone ; RR 1,50, IC à 95 % entre 0,88 et 2,55). Ces résultats sont d'un niveau de confiance faible en raison d'une grande imprécision.
Aucun critère de jugement secondaire n'a été rapporté pour les personnes nécessitant un médicament de secours ou une intervention chirurgicale.
Post-édition effectuée par Astrid Zessler et Cochrane France. Une erreur de traduction ou dans le texte d'origine ? Merci d'adresser vos commentaires à : traduction@cochrane.fr