La dépendance aux opiacés est liée à des problèmes sociaux et de santé publique. Les personnes s'injectant des opiacés sont particulièrement à risque, non seulement parce qu'elles deviennent dépendantes plus rapidement par rapport à d'autres voies d'administration, mais aussi parce qu'elles sont exposées à des conséquences comme des risques accrus de mortalité par overdose, des maladies infectieuses et des problèmes de santé. Au moins les trois quarts des consommateurs d'opiacés dans le monde consomment de l'héroïne.
Un traitement de substitution aux opiacés consiste à prescrire un opiacé pour remplacer l'héroïne illicite ou d'autres opiacés. Il s'agit d'un traitement à long terme qui réduit l'injection d'héroïne illicite, les risques de décès, la transmission de virus par le sang et la criminalité.
Les traitements d'entretien qui incitent les patients à continuer leur traitement et à cesser toute consommation d'héroïne contiennent de la méthadone, de la buprénorphine et de la diacéthilmorphine, seules ou associées à des traitements psychosociaux. Afin de diversifier les possibilités de traitement, il est important de clarifier les effets bénéfiques que chaque intervention spécifique peut apporter aux patients. La morphine orale à libération prolongée (SROM pour « Slow Release Oral Morphine ») est administrée une fois par jour et proposée aux patients qui ne tolèrent pas la méthadone ou qui réagissent mal aux autres traitements d'entretien disponibles.
La présente revue n'a identifié aucune preuve suffisamment probante pour évaluer l'efficacité de la SROM dans un traitement d'entretien aux opiacés. Seuls trois essais contrôlés randomisés impliquant 195 participants répondaient à nos critères d'inclusion. Les résultats de deux études suggéraient une éventuelle diminution de la consommation d'opiacés chez les personnes sous SROM. Dans une autre étude, l'administration de SROM était liée à une baisse des symptômes dépressifs. Le maintien du traitement n'était pas clairement différent parmi les interventions comparées. Des effets indésirables étaient plus fréquents avec la SROM par rapport à la buprénorphine ou à la méthadone, notamment des crampes d'estomac, des céphalées, des douleurs dentaires, des constipations, des vomissements et des insomnies.
Ces études se composaient d'un nombre réduit de participants, d'un suivi très court et étaient conçues de sorte à répondre à différentes questions. Dans l'ensemble, la qualité des preuves peut être considérée comme étant médiocre.
La présente revue n'a pas identifié de preuves suffisantes pour évaluer l'efficacité de la SROM dans un traitement d'entretien aux opiacés car seules trois études répondant à nos critères d'inclusion ont été identifiées. Deux études suggéraient une éventuelle diminution de la consommation d'opiacés chez les personnes sous SROM. Dans une autre étude, l'administration de SROM était liée à une baisse des symptômes dépressifs. Le maintien du traitement n'était pas significativement différent parmi les interventions comparées, alors que ses effets indésirables étaient plus fréquents chez les personnes sous SROM.
Les traitements de substitution aux opiacés permettent aux patients de poursuivre leur traitement et de ne plus consommer d'héroïne. Une question ouverte demeure, à savoir si la morphine orale à libération prolongée (SROM) peut constituer une éventuelle alternative pour les personnes dépendantes aux opiacés qui répondent mal aux autres traitements d'entretien disponibles.
Évaluer l'efficacité de la SROM en tant que pharmacothérapie d'entretien alternative pour le traitement de la dépendance aux opiacés.
Nous avons effectué des recherches dans le registre d'essais du groupe Cochrane sur les drogues et l'alcool, le registre Cochrane des essais contrôlés (CENTRAL - The Cochrane Library numéro 3, 2013), MEDLINE (de janvier 1966 à avril 2013), EMBASE (de janvier 1980 à avril 2013) et les listes bibliographiques des articles.
Des essais contrôlés randomisés (ECR) et quasi randomisés comparant l'efficacité de la SROM à un autre traitement d'entretien ou à l'absence de traitement.
Deux auteurs de la revue ont indépendamment sélectionné des articles en vue de leur inclusion, extrait des données et évalué les risques de biais des études incluses.
Trois études totalisant 195 participants ont été incluses dans la revue. Deux étaient des essais croisés et une était un ECR en groupes parallèles. Le maintien du traitement semblait dépasser les 80 % dans l'ensemble des trois études (sans différence significative avec les groupes témoins). Néanmoins, il doit être précisé que les études étaient de durées différentes. L'une s'étendait sur six mois et les deux autres sur six et sept semaines. La consommation d'opiacés lors de l'administration de SROM était inférieure à non statistiquement ou cliniquement différente des interventions témoins, alors qu'il n'y avait aucune différence au niveau de la consommation d'autres substances.
La SROM semblait équivalente aux interventions témoins en termes de gravité de la dépendance ou du fonctionnement social/santé mentale, mais les symptômes graves de sevrage des opiacés avaient tendance à diminuer par rapport à la méthadone (score de sevrage 2,2 contre 4,8, valeur de P = 0,06). La morphine était généralement bien tolérée et préférée par une proportion de participants (sept personnes sur neuf dans une étude). Elle semblait réduire les manques, les symptômes dépressifs (mesurés à l'aide de l'inventaire de dépression de Beck ; valeur de P < 0,001), les problèmes physiques (mesurés à l'aide de la liste de l'échelle Beschwerde-Liste (BL) ; valeur de P < 0,001) et les symptômes d'anxiété (valeur de P = 0,008). La qualité de vie des personnes traitées par SROM n'était pas significativement différente ou avait empiré par rapport aux personnes sous méthadone et buprénorphine. D'autres mesures de la fonction sociale, comme les finances, la famille et la satisfaction globale, étaient meilleures chez les personnes continuant leur traitement avec des substances témoins par rapport à celles qui continuaient de prendre de la SROM. Plus particulièrement, les personnes sous méthadone montraient des valeurs plus favorables pour les loisirs (5,4 contre 3,7, valeur de P < 0,001), le logement (6,1 contre 4,7, valeur de P < 0,023), les partenariats (5,7 contre 4,2, valeur de P = 0,034), les relations amicales et les connaissances (5,6 contre 4,4, valeur de P = 0,003), la santé mentale (5,0 contre 3,4, valeur de P = 0,002) et l'estime de soi (8,2 contre 5,7, valeur de P = 0,002) par rapport aux personnes sous SROM ; alors que celles sous buprénorphine obtenaient de meilleures scores en termes de santé physique.
Les événements indésirables médicaux étaient nettement plus nombreux chez les personnes sous SROM que dans les groupes témoins. Aucune des études n'incluait des personnes présentant une faible réponse documentée à un autre traitement d'entretien.